février 2009 (22)

vendredi 27 février 2009

LES MÉDECINS DE L’AMOUR (4)

Je dois une reconnaissance éperdue à un petit livre qui, il y a dix ans (il était temps !), m'a totalement libéré de toute inhibition et de tout moralisme judéo-chrétien. D'ailleurs, chaque parent devrait bien le recommander à ses rejetons pré-pubères, qu'il s'agisse de filles ou de garçons. Le titre de l'opus : « L'Éloge de la masturbation » (Zulma, 1997). Dans la même collection, Philippe Brenot, psychiatre, sexologue, auteur et… bienfaiteur de l'humanité a fait paraître un autre petit livre essentiel : « Les Médecins de l'Amour ». Il m'a semblé judicieux de mettre en ligne régulièrement quelques extraits significatifs et, j'espère, apéritifs surtout en ces temps où souffle, d'Amérique ou du Vatican, un vent aigre de puritanisme.

Les “médecins de l'amour” existent depuis toujours, depuis que les hommes et les femmes connaissent les nombreuses difficultés de l'union amoureuse. Du chaman de la préhistoire aux prêtresses d'Ishtar, du poète Ovide à Léonard de Vinci, d'Ambroise Paré à Nicolas Venette, d'Havelock Ellis à Freud, à Masters & Johson… et à Brenot, ces médecins-là sondent les arcanes de l'âme pour en comprendre les plus intimes rouages et en soulager les blocages. Ils sont poètes, toubibs, anatomistes, psychologues… Ils ont été les pionniers de cette connaissance de la sexualité humaine, ils fondent nos idées dans ce domaine de l'intime et du secret qui est encore un tabou de nos sociétés alors que règne la misère sexuelle dans un désert éducationnel et une surenchère commerciale.

Vont donc défiler ici une quinzaine d'experts, chaque notice biographique étant suivie de brefs « morceaux choisis » que Philippe Brenot a nommés « documents de l'amour » (judicieusement traduits par lui en langage contemporain lorsque la langue est trop antique ou le jargon trop médical). Ces textes nous montreront toute la pré-science de ces hommes de connaissance, leur grande modernité ou encore la beauté de leur style littéraire.

Aujourd'hui le chirurgien et psychologue avant l'heure Jacques FERRAND.

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jeudi 26 février 2009

CLASSE MOYENNE

« C'est là notre crainte de fond, qu'une société de consommation axée sur une socialisation type “classe moyenne” détruise simultanément les valeurs aristocratiques et celles qui étaient nées de la colère du peuple. C'est la classe moyenne qui donne le ton, qui diffuse son conformisme et répand son  […]

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mercredi 25 février 2009

UNE FOIS J’AI VOULU ÉCRIRE UN ROMAN HÉTÉROSEXUEL

Dans mon dernier ”vrai faux journal romanesque” qui vient de paraître (« Cet été plein de fleurs » à l'Harmattan), si le jeune et séduisant héros s'appelle Paul, beaucoup de jeunes filles en fleurs lui volent souvent la vedette : Lily, Colette, Denise, Cécile, Béa, Lolo de Catelin… et j'en passe ! J'ajoute qu'il n'y a pas une seule scène de sexe et pas une seule allusion à l'anatomie intime (que je me complais si souvent à célébrer… exclusivement lorsqu'elle est virile !). Evidemment, « homosexuel », « gay », « inversion », « homosexualité », « pédérastie »… autant de mots qui sont absents (il est vrai que l'action ou… l'absence d'action se passe en 1919).

Cette œuvre ambitieuse risque donc bien de décevoir ici et là de rassurer. (Ouf ! à soixante ans, il était temps que notre héros se range, soupireront d'aise certaines de mes groupies.) Mais pour son auteur ? Aïe ! Disons que ce 12ème opus est à la fois une fierté sinon un soulagement et sinon un tourment du moins un très léger trouble. À elle seule, cette phrase tarabiscotée révèle déjà un embarras, non ? Oui ou non, me suis-je (enfin) rangé ? Ai-je trahi notre cause ? Pour preuve de cette très légère mauvaise conscience, mon ton spontanément gêné ou un brin contrit dans les dédicaces de mes services de presse (« Ni gai ni gay… je cours le risque. Serez-vous déçu ? ») ou encore ma fureur hier lorsque je me suis aperçu que mon nouvel opus venait d'être classé par un site de vente en ligne dans la catégorie « littérature érotique gay » !!!

Bref, pour en avoir le cœur net, j'ai relu le témoignage d'un écrivain espagnol Eduardo Mendicutti. J'avais acheté cet ouvrage collectif du temps de ma militance frénétique tout de suite après mon tardif coming-out. Entre cet auteur et moi, bien de peu de choses communes excepté la problématique de « l'écrivain gay » mais lorsque je suis arrivé à la conclusion, après son test si judicieux (que j'ai refait pour mon propre compte) j'ai éclaté de rire. Ce n'était pas un rire de nervosité mais de jubilation : ouf ! malgré les apparences qui sont contre moi, ce n'est pas encore cette fois que je suis totalement “guéri” ! Et je m'en réjouis.

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lundi 23 février 2009

OUR BODY À CORPS OUVERT

Je viens de voir une exposition vraiment formidable. Entre autres spécimens, un cadavre qui joue aux échecs, crâne ouvert pour exhiber son cerveau. Un autre qui fait du vélo, nerfs et muscles bien visibles, rutilants, à vif. Un peu plus loin, un corps découpé en tranches comme pour une IRM, mais "en vrai": c'est l'exposition “Our body, à corps ouvert”, qui vient d'ouvrir ses portes à Paris, après avoir été déjà vue par 30 millions de personnes dans le monde.

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dimanche 22 février 2009

BONNET D’ÂNE POUR SARKO

« L'autre jour, je m'amusais, on s'amuse comme on peut, à regarder leprogramme du concours d¹attaché d¹administration. Un sadique ou un imbécile,choisissez, avait mis dans le programme d¹interroger les concurrents sur LaPrincesse de Clèves. Je ne sais pas si cela vous est souvent arrivé dedemander à la guichetière ce qu¹elle pensait de la Princesse de Clèves ?Imaginez un peu le spectacle ! »

Nicolas Sarkozy, le 23 Février 2007 à Lyon.

On aurait tort de prendre cette énième saillie populiste de Sarko pour une anecdote, c'est un symptôme : celui de son idéologie utilitariste effrénée.
Comme l'a écrit récemment le philosophe germaniste de l'université Paris-Sorbonne Alexandre Dupeyrix : « Le discours de Sarkozy est porté par la performance, l'obsession de tout mettre en concurrence. Tout doit avoir une utilité – mais aux yeux de qui ? et qui en fixe les critères ? – et cette utilité doit être quantifiée, testée, validée. (…) Le grec ancien, ça sert à quoi ? Le français du Moyen Age, ça remplit le Stade de France ? L'étude du sanskrit, combien de brevets ? La crise économique actuelle entame sérieusement la crédibilité d'un modèle fondé sur une obsession mortifère de la compétition et du gain. Que cette atmosphère générale de pression permanente nourrit un malaise sourd et une violence sociale. C'est là qu'on attendrait une vision, un souffle, une énergie véritablement positive, et non des décharges d'agressivité. Notre pays n'a pas besoin d'un chef d'entreprise vindicatif à sa tête, mais d'un homme de rassemblement qui se soucie de la paix sociale, d'un vivre-ensemble harmonieux et de la poursuite du bonheur – utopie qui est au fondement de notre modernité politique (cf. le préambule de la Déclaration de 1789). Au fond, tout cela demande une certaine hauteur de vue. C'est un problème de… politique de civilisation ! Tiens, tiens, on n'en entend plus parler de celle-là. »

Et à propos de civilisation et de culture occidentale, la seule réponse valable au rustre cynique qui nous gouverne est bien sûr de donner ce dimanche matin la parole à l'auteur, Madame de La Fayette.

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vendredi 20 février 2009

CET ÉTÉ PLEIN DE FLEURS (dernier chapitre)

Depuis le vendredi 25 avril 2008 et jusqu'aujourd'hui 20 février 2009, ‘ai mis chaque semaine en ligne un manuscrit inédit « CET ÉTÉ PLEIN DE FLEURS, Chronique d'une mélancolie». Ce sont aujourd'hui les toutes dernières lignes…

Édité par les éditions de L'Harmattan dans la collection « Ecritures », ce 12ème opus est disponible en librairie depuis quelques jours. Celles et ceux qui ont aimé cette histoire ou qui n'ont pu lire ici et là que des fragments seront peut-être heureux de la retrouver in extenso dans un fort bel ouvrage (voir présentation complète avec extraits, fac-similé de la jaquette, nombreux documents iconographiques, bande originale du livre etc. dans la partie « bibliographie » de ce site).

Partons donc une dernière fois à la découverte de ce petit Paul de Montclairgeau durant les deux dernières années de sa vie, dans son Jura natal et à Paris ou il dépérit, ce jeune homme qui est si touchant, si contemporain, si rimbaldien, si agaçant aussi… et qui ressemble à l'auteur comme un frère… forcément ! Puisque c'est ma propre adolescence que je réécris à titre posthume en y injectant ma fièvre et mes utopies de jeune homme prolongé et de moins en moins mûr (mais je préfère être immature tardif que prématurément blet!).

Embarquons une ultime fois pour cette “Chronique d'une mélancolie”, en se remémorant encore les deux citations en exergue de l'œuvre et qui, dès le porche, l'éclairent :

On ne peint bien que son propre cœur, en l'attribuant à un autre.
CHATEAUBRIAND

Ah ! l'égoïsme infini de l'adolescence, l'optimisme studieux : que le monde était plein de fleurs cet été ! Les airs et les formes mourant… - Un chœur, pour calmer l'impuissance et l'absence ! Un chœur de verres, de mélodies nocturnes… En effet les nerfs vont vite chasser.
RIMBAUD

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jeudi 19 février 2009

L'HOMME QUI CRIE (Discours sur le colonialisme)

« Ma bouche sera la bouche des malheurs qui n'ont point de bouche, ma voix, la liberté de celles qui s'affaissent au cachot du désespoir. » Et venant je me dirais à moi-même : « Et surtout mon corps aussi bien que mon âme, gardez-vous de vous croiser les bras en l'attitude stérile du spectateur, car la vie n'est pas un spectacle, car une mer de douleurs n'est pas un proscenium, car un homme qui crie n'est pas un ours qui danse... »

« Cahier d'un retour au pays natal », grande œuvre poétique d'Aimé Césaire (1913-2008), est l'un des points de départ de la négritude. Aimé Césaire poursuivra sa dénonciation du racisme et du colonialisme avec son “Discours sur le colonialisme” (long extrait ci-après). Un texte formidable, sans concession qu'il est bon de se remémorer au moment où les Antilles françaises vivent une douloureuse mais salutaire prise de conscience. Mais pourquoi avoir tant tardé à entendre cette voix si lointaine et toute proche ? Une voix si longtemps étouffée ou muselée et avec quelle bonne conscience !

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mercredi 18 février 2009

HISTOIRE CORSE (suite et fin)

Ces jours-ci, la Corse est à la une et on n'a pas fini de parler du procès d'Yvan Colonna, surtout après le rebondissement suite aux déclarations de Didier Vinolas. Coupable ou non, les relents d'un « procès politique » sentent déjà très mauvais. D'autre part, si mon ami Jacques Gaillot se mouille, ce n'est sans doute pas à la légère : à quand le retour de la normalité judiciaire en France et le respect de la présomption d'innocence ?

Retour à la littérature : la nuit dernière, alors que mon esprit insomniaque passait en revue l'actualité, un nom a soudain jailli dans ma mémoire à propos du berger de Cargèse : « Mon père est Mateo Falcone ». Mateo Falcone ? Où était-ce ? Quand ? Des syllabes pleines d'un mâle orgueil… mais oui ! j'associai vite ce nom à mon enfance studieuse, à un des lectures qui m'avait alors très impressionné, une célèbre nouvelle de Mérimée. Terminée le 14 février 1829 et publiée avec le sous-titre“ Mœurs de la Corse”, cette nouvelle parut le 3 mai 1829, dans la Revue de Paris, fondée au mois d'avril de la même année. Ce texte apporta richesse et célébrité à son auteur. La couleur locale, si fortement marquée dans cette nouvelle, est puisée dans les sources livresques, puisque Prosper Mérimée ne visitera la Corse que dix ans plus tard.

Je n'ai encore jamais visité l'île de Beauté mais j'ai de nouveau vibré à cette terrible histoire que je mets en ligne cette semaine en trois épisodes successifs.

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mardi 17 février 2009

HISTOIRE CORSE (2)

Ces jours-ci, la Corse est à la une et on n'a pas fini de parler du procès d'Yvan Colonna, surtout après le rebondissement suite aux déclarations de Didier Vinolas. Coupable ou non, les relents d'un « procès politique » sentent déjà très mauvais. D'autre part, si mon ami Jacques Gaillot se mouille, ce n'est sans doute pas à la légère : à quand le retour de la normalité judiciaire en France et le respect de la présomption d'innocence ?

Retour à la littérature : la nuit dernière, alors que mon esprit insomniaque passait en revue l'actualité, un nom a soudain jailli dans ma mémoire à propos du berger de Cargèse : « Mon père est Mateo Falcone ». Mateo Falcone ? Où était-ce ? Quand ? Des syllabes pleines d'un mâle orgueil… mais oui ! j'associai vite ce nom à mon enfance studieuse, à un des lectures qui m'avait alors très impressionné, une célèbre nouvelle de Mérimée. Terminée le 14 février 1829 et publiée avec le sous-titre“ Mœurs de la Corse”, cette nouvelle parut le 3 mai 1829, dans la Revue de Paris, fondée au mois d'avril de la même année. Ce texte apporta richesse et célébrité à son auteur. La couleur locale, si fortement marquée dans cette nouvelle, est puisée dans les sources livresques, puisque Prosper Mérimée ne visitera la Corse que dix ans plus tard.

Je n'ai encore jamais visité l'île de Beauté mais j'ai de nouveau vibré à cette terrible histoire que je mets en ligne cette semaine en trois épisodes successifs.

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lundi 16 février 2009

HISTOIRE CORSE

Ces jours-ci, la Corse est à la une et on n'a pas fini de parler du procès d'Yvan Colonna, surtout après le rebondissement suite aux déclarations de Didier Vinolas. Coupable ou non, les relents d'un « procès politique » sentent déjà très mauvais. D'autre part, si mon ami Jacques Gaillot se mouille, ce n'est sans doute pas à la légère : à quand le retour de la normalité judiciaire en France et le respect de la présomption d'innocence ?

Retour à la littérature : la nuit dernière, alors que mon esprit insomniaque passait en revue l'actualité, une phrase a soudain jailli dans ma mémoire à propos du berger de Cargèse : « Mon père est Mateo Falcone ». Mateo Falcone ? Où était-ce ? Quand ? Des syllabes pleines d'un mâle orgueil… mais oui ! j'associai vite ce nom à mon enfance studieuse, à un des lectures qui m'avait alors très impressionné, une célèbre nouvelle de Mérimée. Terminée le 14 février 1829 et publiée avec le sous-titre“ Mœurs de la Corse”, cette nouvelle parut le 3 mai 1829, dans la Revue de Paris, fondée au mois d'avril de la même année. Ce texte apporta richesse et célébrité à son auteur. La couleur locale, si fortement marquée dans cette nouvelle, est puisée dans les sources livresques, puisque Prosper Mérimée ne visitera la Corse que dix ans plus tard.

Je n'ai encore jamais visité l'île de Beauté mais j'ai de nouveau vibré à cette terrible histoire que je mets en ligne cette semaine en trois épisodes successifs.

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dimanche 15 février 2009

PAROLE POUR UN TEMPS DE CRISE

Voici l'une des plus belles pages de mon philosophe préféré. Non pas la plus belle, mais la plus tonique, celle qui fait du bien, comme un massage salutaire ou une musique relaxante. Si je la relis ce matin, si patiemment, comme presque chaque jour, si je l'ai transcrite sur ce blog, c'est d'abord parce qu'elle m'a fait du bien à moi-même, c'est parce que chaque mot tapé sur le clavier était une vitamine que j'introduisais en moi-même, le virus du bonheur qu'à nouveau je tente de m'inoculer. Puisque tout part et revient au corps. Pour finir, on souffre et on meurt toujours de maladie. Et les mots ont cette capacité d'alléger sinon de guérir tout à fait certains maux…

Le plus étrange, c'est qu'Alain écrivit cette chronique ô combien stimulante le 29 mai 1909, le lendemain de la mort d'un adolescent qui s'était suicidé. Et Comte-Sponville d'ajouter dans un commentaire : « C'est cela, cette horreur, qu'il s'agit de penser, de comprendre, de surmonter. ‘La vie n'a plus la saveur de la vie. Plaisir aussi bien que douleur, tout est comme frelaté ; l'action est comme une source tarie…' Et le lecteur partait avec ces deux trésors, un peu de lumière, un peu de nuit, la mort d'un lycéen, l'amour de la vie, l'un et l'autre mêlés, indissociablement, puisque aucune mort n'est triste qu'autant que la vie est aimable… Je relis souvent ce Propos, je le trouve toujours aussi beau, et d'une beauté qui ne ment pas. »
(André Comte-Sponville in Impromptus, Puf, 1996).

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vendredi 13 février 2009

CET ÉTÉ PLEIN DE FLEURS (avant-dernier chapitre)

À partir du vendredi 25 avril 2008 et jusqu'au 20 février 2009, je mets chaque semaine en ligne un manuscrit inédit « CET ÉTÉ PLEIN DE FLEURS, Chronique d'une mélancolie».
Édité par les éditions de L'Harmattan dans la collection « Ecritures », ce 12ème opus est disponible en librairie depuis quelques jours.
Partons encore une fois à la découverte de ce petit Paul de Montclairgeau durant les deux dernières années de sa vie, dans son Jura natal et à Paris ou il dépérit, ce jeune homme qui est si touchant, si contemporain, si rimbaldien, si agaçant aussi… et qui ressemble à l'auteur comme un frère… forcément ! Puisque c'est ma propre adolescence que je réécris à titre posthume en y injectant ma fièvre et mes utopies de jeune homme prolongé et de moins en moins mûr (mais je préfère être immature tardif que prématurément blet!).
Embarquons donc pour cette Chronique d'une mélancolie, en se remémorant chaque fois les deux citations en exergue de l'œuvre et qui, dès le porche, l'éclairent :

On ne peint bien que son propre cœur, en l'attribuant à un autre.
CHATEAUBRIAND

Ah ! l'égoïsme infini de l'adolescence, l'optimisme studieux : que le monde était plein de fleurs cet été ! Les airs et les formes mourant… - Un chœur, pour calmer l'impuissance et l'absence ! Un chœur de verres, de mélodies nocturnes… En effet les nerfs vont vite chasser.
RIMBAUD

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jeudi 12 février 2009

LA BALLADE DES PERDUS (ou l’euthanasie punie)

Eluana vient de « mourir ». Je mets des guillemets car la jeune femme était plongée dans un coma végétatif depuis 17 ans. Sa famille, après des années d'un long combat, avait finalement obtenu le droit qu'on cesse de l'alimenter au grand dam de l'opinion publique et du Vatican. Le cardinal Javier Lozano Barragon, président du conseil pontifical pour les opérateurs sanitaires du Vatican, avait alors parlé d'un «abominable assassinat», tandis que le pape Benoît XVI évoquait un «acte indigne de l'homme». Lundi, le Vatican a toutefois réagi à l'annonce de la mort de la jeune femme en expliquant que «Dieu pardonne aux responsables de sa mort ». Ouf ! Tout est donc bien qui finit bien ?

Il y a quelques mois, le même cas, toujours en Italie, la même souffrance des victimes et des familles, la même indignation de part et d'autre, les mêmes vociférations politiques et vaticanes. Ne serait-il pas plus simple que, de chaque côté des Alpes, des dispositions législatives soient prises ? Question subsidiaire : la société française – en refusant qu'une loi intègre un « principe d'exception » autorisant une fin de vie dans la dignité – se montrera-t-elle encore longtemps aussi hypocrite et rigoriste que l'Eglise catholique romaine ?

À propos du cas de Piergiorgio Welby (à qui furent refusées des obsèques religieuses) j'avais écrit un texte durant la nuit de Noël. Je le remets en ligne aujourd'hui tel quel ; rien à atténuer, rien à changer hélas… puisque, là-bas comme ici, rien a changé.

Jusqu'à la prochaine euthanasie…

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mercredi 11 février 2009

COMPLAINTE DE LA LUNE

Hier soir, dans le ciel de Paris, vers 21 heures, la lune était si grosse, si ronde, si omniprésente que je ne parvenais pas à détacher mes regards tandis que je traversais le pont de St Cloud. Dans sa face blême, je croyais apercevoir, presque distinctement, un œil borgne et une immense bouche d'ombre. Je fus fasciné par cette présence à la fois paisible et incongrue. Stérile la lune ? Morne et sans relief la face de Séléné ? Je me disais : plus j'avance, plus je vais percevoir au bout du pont d'autres détails de son intimité. Quelle impatience ! Quelle illusion ! Quel grand gosse je suis ! J'avais oublié les distances sidérales – 384.402 kilomètres – et la différence abyssale : l'astre tout en haut, et moi, le ridicule homoncule trottinant vers sa chambrette. N'empêche, ce 10 février 2009, le strip-tease de la lune dans le ciel de Paris, ce fut quelque chose ! En plus, c'était à l'œil ! À peine arrivé chez moi, malgré ma lassitude, je bondis sur le recueil de Jules Laforgue : mon cher poète sait bien mieux que moi parler à la lune et c'est ensemble, à mi-voix et dans un grand recueillement, que nous avons récité les “litanies des derniers quartiers” : elle est l'Hostie et son silence notre ciboire !

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mardi 10 février 2009

S-IMMOLER À LA SOLIDARITÉ ?

Depuis trois semaines, les postiers de Boulogne-Billancourt sont en grève. Malgré tous les inconvénients (mon quotidien arrive avec trois ou quatre jours de retard !... les factures aussi, ouf !), je ne parviens pas à les blâmer. Je me sens solidaire d'eux ; non pas en otage, mais en partage. Mon sourire un brin fataliste est ma réponse et mon encouragement tacite. À défaut d'être un grand révolutionnaire – seul, on ne peut rien – il convient de prendre ses marques et de poser de petits actes au quotidien qui font qu'on se bat aussi et qu'on n'a pas honte de soi-même. C'est ainsi par exemple que depuis l'expédition punitive d'Israël à Gaza, je n'achète plus mon jus d'orange de prédilection fabriqué à Jaffa… ce qui n'est, j'en conviens, qu'une goutte de jus de fruit dans un océan de profits ! Mais retour à la Poste. Nous sommes au printemps 1909 à Rouen et le philosophe Alain est perplexe.

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lundi 9 février 2009

CES “TRADIS” TRISOCOMIQUES

J'ai un fils trisomique de 21 ans que j'aime tendrement mais dont le raisonnement spécifique m'a longtemps déconcerté et mortifié. Pendant de longues années, à ma question rituelle « Au dessert, veux-tu une pomme ou un yaourt ? », il répondait impavide : « Pomme yaourt ! ».

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dimanche 8 février 2009

SUR LA BEAUTÉ

Je dédie ce passage écrit par l'éblouissante George Sand à ma grande amie M*** qui se désole de sa beauté qu'elle dit enfuie et fanée. « Cette cyclique déprime - m'écrit-elle dans son courriel d'hier - est due au fait que je me mets à douter totalement de votre amitié. Que vous n'en avez rien à faire de moi, de ma vieillesse avec ma taille et mon cou trop court, mes rides et mes yeux pochés… » Mais non, chère amie, votre cœur délicat n'a pas de rides, le cœur n'en a jamais et mes yeux affectueux et reconnaissants voient votre maturité comme une chance pour vous comme pour moi et un embellissement, fruit de votre histoire, de votre expérience et de votre générosité ! Tout le reste n'est-il pas vaine coquetterie ? Car là où est ton trésor, là est d'abord ton cœur.

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vendredi 6 février 2009

CET ÉTÉ PLEIN DE FLEURS (41)

À partir du vendredi 25 avril 2008, et ce désormais avant chaque week-end, je mets en ligne un manuscrit inédit « CET ÉTÉ PLEIN DE FLEURS, Chronique d'une mélancolie».
Prochainement édité par les éditions de L'Harmattan dans la collection « Ecritures », ce 12ème opus devrait sortir d'ici quelques jours. (La parution ayant été annoncée par mon Editeur pour Noël, le suspense devient vraiment torride et frustrant pour mes souscripteurs. Qu'ils reçoivent ici toutes mes excuses !)
En attendant, partons sans plus attendre - et en avant-première - à la découverte de ce petit Paul de Montclairgeau durant les deux dernières années de sa vie, dans son Jura natal et à Paris ou il dépérit, ce jeune homme qui est si touchant, si contemporain, si rimbaldien, si agaçant aussi… et qui ressemble à l'auteur comme un frère… forcément ! Puisque c'est ma propre adolescence que je réécris à titre posthume en y injectant ma fièvre et mes utopies de jeune homme prolongé et de moins en moins mûr (mais je préfère être immature tardif que prématurément blet!).
Embarquons donc pour cette Chronique d'une mélancolie, en se remémorant chaque fois les deux citations en exergue de l'œuvre et qui, dès le porche, l'éclairent :

On ne peint bien que son propre cœur, en l'attribuant à un autre.
CHATEAUBRIAND

Ah ! l'égoïsme infini de l'adolescence, l'optimisme studieux : que le monde était plein de fleurs cet été ! Les airs et les formes mourant… - Un chœur, pour calmer l'impuissance et l'absence ! Un chœur de verres, de mélodies nocturnes… En effet les nerfs vont vite chasser.
RIMBAUD

J'ajoute que je suis particulièrement fier de présenter la page qui va suivre, une de celles qui m'a demandé le plus de travail et m'a procuré le plus d'émotion, surtout la description du malaise de Paul à la fin. Mais qu'en dira le lecteur ?

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jeudi 5 février 2009

… ET MILLE RATONS LAVEURS !

Vraiment fastoche ce matin de rédiger mon blog. À manif hétérogène, plan de relance disparate. Contre le chômage, du saupoudrage. Et en guise de pouvoir d'achat de plaisants entrechats. Décidément, le meilleur expert économique de notre 1er ministre est à l'évidence Jacques Prévert !

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mercredi 4 février 2009

PRÉSENCE… ABSENCE

« … si l'on est réduit à inventer même en partie quelqu'un, mieux vaut l'absence. Mais si l'on veut seulement le découvrir, rien ne vaudra jamais une seule heure de présence. »

Seul l'être qui aime d'Amour – ou qui a aimé un jour – (même s'il n'emploie jamais ce mot rebattu, sans aucun doute obscène car on aime aussi les frites et le camembert !), seul celui-là ou celle-là peut entrer dans les méandres de ce beau texte d'Althusser, en tirer un suc à la fois vénéneux et savoureux, un tourment profond et un invincible bonheur.

(Evidemment, mon regard regarde au loin vers le Golf d'Oman…)

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mardi 3 février 2009

LIBÉRATION.fr OU LES COMMENTAIRES EN ENFER

" Cette contribution, contraire à la charte de Libération, a été envoyée au cimetière des commentaires." Hier, quelques heures après sa parution en ligne sur Libération.fr, mon premier texte – qui a suscité un passionnant débat (lui n'a pas été mis à l'Index, ouf !) – est passé à la trappe comme « contraire à la charte ». J'ai lu et relu l'épitre que j'avais écrite suite à l'article « L'absolution qui cloche » ; lu et relu également la charte de Libération. Et je n'ai toujours pas compris cette censure. Alors, je le demande ce matin, pourquoi rôtir en enfer ? Alors que je n'avais péché, mes bien chers frères, ni contre la vérité ni contre la charité. Mais peut-être y a-t-il deux poids deux mesures… Lorsque le Père Joffrin, dans son édito intitulé « Faute », écrit que « La communication du pape avec l'Esprit saint a manifestement subi une panne de réseau » ou que « les brebis [intégristes] sont le plus souvent affligées d'une toison d'un brun très foncé », quelle horreur, ma chère, lire de tels propos dans Libé, nous nous sentons bafouées dans notre Foi, outragées dans notre Identité chrétienne ! Que le bon apôtre ne s'est-il donc lui-même autocensuré au nom de la Charte des éditorialistes responsables ! Mais basta, fidèle internaute, je te laisse juge de mon impardonnable prose. Un conseil néanmoins :ne vas pas plus avant si tu as peur de perdre ton âme.

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lundi 2 février 2009

LA TERRIFIANTE COMÈTE

Au printemps 1910, la presse ne parlait que d'une effroyable menace : une comète qui allait mettre en péril la vie sur terre. Ce fut la Grande Peur de 1910. Aujourd'hui, c'est la crise, pardon, mettons des majuscules et du gras, ce sera encore plus impressionnant, LA C R I S E (à laquelle s'ajoute, pour faire bonne mesure, le réchauffement climatique). 2009 sera donc bien l'« Annus horribilis » que les médias se complaisent à décrire et à noircir. Et après ? Mais encore ? Un philosophe est quelqu'un qui sait raison garder et entend dégonfler les baudruches. Non qu'il ne faille pas être lucide et vigilant ! D'abord ne se laisser ni manipuler ni impressionner car la vie se joue aussi ailleurs… D'où l'intérêt piquant de ce papier d'Alain en première page de la “Dépêche de Rouen” à l'époque où le moral des Français était au plus bas et où l'on croyait à l'irréparable… sans trop y croire ni trop s'en faire !

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